jeudi 12 janvier 2017

Le Texas: cuisine et gastronomie (partie 1)



A l’annonce de notre départ, je me souviens qu’un copain a demandé à l’Homme si j’allais écrire un blog de cuisine texane. A l’époque, j’avais trouvé l’idée saugrenue: « un blog spécialisé dans les hamburgers?! », et j’avais balayé l’idée sans jamais plus y penser. La semaine dernière lors d’une conversation avec ma copine J. la question de ce que j’allais faire de ce blog après mon retour s’est posée. Je suppose qu’en pessimiste avisée, j’ai du expliquer que ce blog allait mourir de sa belle mort à une vitesse à peu près équivalente à celle à laquelle j’allais sombrer dans la neurasthénie à mon retour dans la mère patrie.

Ma copine n’étant pas du genre à se laisser endormir par mes lamentations en tout genre, a répliqué que je n’avais jamais écrit sur la cuisine texane et que je pourrais créer un blog de bouffe vu que c’est une de mes passions « numéro un » dans la vie. 
Il faut avouer que ce n’est pas un hasard si la conversation a pris ce tour-là. Généralement nos bavardages commencent par un tour d’horizon concernant la santé de nos familles respectives, suivi par un « quick check» (un test rapide) météorologique de nos deux domiciles, suivi de nos complaintes politiques françaises, américaines puis internationales si on en a le temps. C’est qu’un point essentiel nous attend: « T’as cuisiné quoi à midi/ au goûter/ ce soir/ Dimanche?

Après un glorieux échange de recettes et d’avis divers et variés, on en vient à s’envoyer nos dernières photos gastronomiques en se congratulant mutuellement sur nos ambitieuses réalisations.

Après un quick check (bis) de mon blog, je constate qu’en effet, je ne t’ai jamais entretenu de mes découvertes gastronomiques texanes. 
Et je pèse mes mots, j’ai bien dit « gastronomiques ». 
Il y a une tradition culinaire texane qui remonte à bien plus longtemps que la découverte de ton premier « Big Mac » et que, oui, l’Histoire avec un grand H, extrêmement riche de cet état, a conduit à une vraie gastronomie, à la différence de certains autres états d’Amérique. 

Je dois reconnaitre que mes débuts ont été rendus un peu difficiles par la confrontation de mes papilles gustatives avec les piments omniprésents dans la cuisine texane. Je n’avais jamais mangé aussi épicé de ma vie. Le Texan mange épicé comme beaucoup des Américains du Sud, et il faut reconnaitre qu’il connait le sujet. 
Mais ne nous perdons pas dans les détails, j’y reviendrai plus tard. 


L’importance de la tradition et du brassage multiculturel

Ce qui rend la cuisine du Texas unique, c’est la succession de six pays souverains sur ses terres. 
Tout d’abord l’Espagne, la France, puis le Mexique, la République du Texas, les Etats Confédérés et pour finir les Etats Unis d’Amérique. 
Ces cultures se sont mélangées depuis plus de 500 ans, comme une bonne marinade pour créer un mélange explosif sur lequel ont été saupoudrées quelques pincées ou plus d’Allemands, Tchèques, Irlandais, Afro-Américains, sans oublier les « Native Americans ». 

Chaque ethnie apportant avec elle, le secret d’une cuisson, d’un ingrédient, d’un plat ou d’une saveur trouvant ses origines dans une contrée lointaine. 
Les immigrations successives ne sont pas les seules responsables de ce brassage: la diversité régionale est aussi un des piliers de la cuisine texane:
  • L’Ouest Texas et son chili,
  • La bande côtière et ses fritures de fruits de mer et ses crevettes au court-bouillon,
  • La tranche de boeuf du Panhandle,
  • Les ribs de porc de l’Est,
  • Les Kolaches de West, entre Waco et Fort Worth,
  • Les saucisses allemandes de Fredericksburg…
L'agriculture, l'élevage et les impératifs dictés par le relief et le climat étonnant pour ne pas dire éprouvant et agressif sont partie prenante de cette diversité.
Le Texan est aussi protecteur de son patrimoine culinaire que le Français du sien. J’imagine la tête d’un Texan devant une pub El Paso à la tv française. J’ai longtemps cru à cause de cette ridicule pub qu’El Paso était au Mexique. Le cliché de la famille mexicaine affublée de sombreros et de fausses moustaches, en train de manger des pseudo-tacos qui soit dit en passant s’effritent et te tombent sur les genoux comme des pauvres miettes: l’horreur totale. Et puis, El Paso est au Texas, bon sang!
Et ne me parle pas fajitas et tortillas qui baignent dans des sauces rouges infâmes et qui sortent de ces boites jaunes, je vais pleurer. 

Ça me rappelle l’histoire de la recette de la ratatouille de Jamie Oliver. Ne te méprends pas, j’adore Jamie Oliver! J’adore le personnage, son engagement et ses recettes, of course! Il y a deux ans de ça, il publie sur sa page Facebook, sa recette de ratatouille. Atterrée par la recette, présentée comme une fantastique recette de « comfort food » pour l’hiver, me vient l’idée dangereuse et saugrenue de commenter pour expliquer, à celui qui est derrière son clavier et qui n’est surement pas Jamie parce que je suis lucide, que sa recette est un ragoût de légumes mais surement pas une ratatouille. 
Il n’a pas fallu deux minutes pour qu’un torrent de haine provenant des groupies de Jamie se déverse sur moi: insultes, menaces, j’ai même constaté qu’une énervée avait fouillé les tréfonds de Google pour coller une photo de moi et expliquait que ma photo prouvait que j’étais évidemment une sale française arrogante. 
Je me suis alors souvenue qu’il n’y a qu’une réponse à opposer aux « haters » d’Internet: surtout NE JAMAIS REPONDRE. Le feu s’éteint généralement de lui-même. 


Sauf quand on se sent investie d’une mission divine. J’ai donc expliqué avec patience et pédagogie comment réaliser une ratatouille digne de ce nom. Au bout de quelques secondes, j’ai compris que leur offrir la recette de ma Mémé, c’était un peu comme donner du lard aux cochons. J’ai supprimé mon poste et j’ai trouvé du réconfort dans l’idée que ces incultes ne connaitraient jamais le goût merveilleux d’une vraie ratatouille de méridionale. 
Viens le ventre vide la prochaine fois, on rentre dans le vif du sujet...

Prochain article: Texas BBQ






mercredi 23 novembre 2016

Thanksgiving, les Cowboys et les Indiens.






Je suis un peu comme Michelle Obama. La ressemblance avec l’incomparable Flotus n’est pas évidente au premier abord. Mais elle a raconté l’autre jour à je ne sais plus quel journaliste, que ces derniers temps elle avait l’impression de faire certaines choses pour la dernière fois à la Maison Blanche. L’heure de mon dernier diner d’état n’a pas encore sonné, mais j'ai un peu la même sensation. Notre dernier Thanksgiving pointant le bout de son nez, on s’est demandé comment le célébrer. 

Ici, Thanksgiving c’est aussi important que Noêl en France. D’ailleurs les voisins ont retiré les décorations d’automne pour installer celles de Noêl depuis début Novembre. Les sociétés de décoration sont en plein boum et tous les jours on assiste aux périlleux accrochages de guirlandes lumineuses le long des toits des maisons. A la nuit tombée, on devine les sapins installés derrière les fenêtres qui disparaitront dès le lendemain de Noêl.
Certains autochtones s’étonnent toujours que les Français ne fêtent pas Thanksgiving. Au cas où tu l’aurais oublié, je te rappelle que Thanksgiving, c’est le premier repas partagé par les indiens et les colons. Enfin, ça c’est la version courte et édulcorée: pour le folklore et surtout pour éviter de couper l’appétit de tout le monde le dernier jeudi de Novembre venu.

Thanksgiving tel qu’il est enseigné aux enfants dans les écoles est une preuve supplémentaire de l’ethnocentrisme des Américains selon certains historiens. La plupart des gamins croient que les premiers habitants de leur pays sont arrivés glorieusement sur le Mayflower en 1620 du côté de la Nouvelle Angleterre, qu’ils n’avaient rien à manger, que l’hiver arrivait et qu’ils n’avaient aucune chance de s’en tirer vivants. Heureusement, les Indiens du coin ont eu pitié de ces pauvres colons et leur ont apporté de quoi se sustenter, la fameuse dinde et le maïs. 
Dans cette version épurée, on oublie l’implication des Espagnols, des Français et surtout l’existence d’un peuple, sur ces terres avant l’arrivée de « l’homme blanc ». 
La vérité est quand même plus triste et moins glorieuse et je te rappelle au passage qu’il s’agit de nos ancêtres européens. 
Bref, quelques épidémies plus tard, gracieusement offertes par les premiers européens à faire la traversée en compagnie de bétails, virus et bactéries en tous genres, la résistance des tribus indiennes est toute relative dans le Nord Est. Les Colons, fraichement arrivés  sur le Mayflower, n’hésitent donc pas à s’installer dans les anciens villages indiens dont les habitants ont été décimés. Sur les écrits des premiers colons, on peut lire que ces épidémies les épargnent parce que « God is on our side» (Dieu est avec nous). La fameuse légende du bon indien, Squanto, qui fait don de victuailles aux colons par bonté pure est légèrement plus compliquée et plus longue tu t’en doutes.
L’homme en question avait traversé plusieurs fois l’Atlantique en tant qu’esclave et quand il est enfin retourné dans son village, il a découvert que sa tribu n’existait plus, ravagée par les épidémies. 

De toute façon, Thanksgiving n’est pas si ancienne, c’est Lincoln qui en 1863 en a fait une fête nationale qui n’avait rien à voir avec les Colons.
Aujourd’hui, il s’agit surtout d’une occasion de rassembler les familles et de partager un repas. La première année de notre arrivée, nous avons saisi l’occasion pour visiter la Louisiane et La Nouvelle Orléans. La deuxième année, j’ai jeté un canard dans le four parce qu’au-delà d’une célébration, pour nous, c’était surtout l’opportunité de tomber sur des victuailles rares le reste de l’année dans les supermarchés. Il a fallu attendre la troisième année pour célébrer Thanksgiving avec des amis texans. Dans leur invitation, on sentait la pression gastronomique: « Nous porterons nos pantalons à taille élastique, vous pouvez en faire autant ». 
Ils nous ont cuisiné un repas délicieux, une dinde farcie et tout un tas d’accompagnements comme le veut la tradition. Au début du repas, on s’est plié avec enthousiasme à la tradition: on a cité pour qui ou quoi on était reconnaissants. On a fait bombance avec un grand plaisir chez nos hôtes texans. Puis, le moment le plus important de la journée a sonné: le match de Thanksgiving. 

Si tu es friand de séries américaines notamment Friends, tu sais qu’il y a deux moments très importants le Jeudi de Thanksgiving: le matin,  il y a la parade retransmise à la télé, en direct de New York et un peu plus tard le match de foot. 
J’ai entendu dans un film à charge sur le foot US une boutade qui disait à peu de choses près: « Tu t’attaques à la NFL? Mais tu sais que ces mecs sont tellement puissants qu’ils sont propriétaires d’un jour de l’année ». 
L’été est dévolu au baseball, Noêl au basket, Thanksgiving est définitivement dédié au foot. A mon grand plaisir, les Dallas Cowboys jouent pour Thanksgiving, tous les ans. Je sais que tu ne t’intéresses probablement pas au foot US sauf au moment du Super Bowl pour les publicités et la mi-temps de folie. Alors je ne te raconterai pas que les Cowboys ont gagné neuf matchs d’affilée. Je ne te raconterai pas non plus les déboires de la star Tony Romo, le quarterback de l’équipe et ses blessures à répétition, ni l’arrivée de Dak Prescott, le rookie quarterback qui l’a officiellement détrôné et qui a marqué 17 touchdowns pour seulement deux interceptions. 

Ça me laisse donc de la place pour te dire que cette année, on célèbre Thanksgiving comme on aime, en avalant les kilomètres à travers les Etats-Unis. On a trinqué l’année dernière avec une margarita et des nachos au green chile à Taos. Cette année, on va trinquer sous les flocons du Colorado. 

Je te laisse sur cette citation trouvée au détour d’un article traitant de la réalité de Thanksgiving, elle m’a paru étrangement d’actualité: 
« God on our side » was used to legitimize the open expression of Anglo-Saxon superiority vis-à-vis Mexicans, Native Americans, peoples of the Pacific, Jews, and even Catholics. Today, when textbooks promote this ethnocentrism with their Pilgrim stories, they leave students less able to learn from and deal with people from other cultures. » James W. Loewen Lies my teacher told me 2007





Traduction de mon cru:
L'expression "Dieu de notre côté" était utilisée pour légitimer ouvertement la supériorité des Anglo-Saxons sur les Mexicains, les Indiens, et les peuples du Pacifique, les Juifs et même les Catholiques. Aujourd'hui, quand les livres mettent en avant cet ethnocentrisme avec leurs histoires de Pères Pèlerins, ils laissent les élèves incapables d'apprendre et d'échanger avec des gens d'autres cultures."




vendredi 11 novembre 2016

Veteran's Day, des larmes et Tom Cruise







Le 11 Novembre en France, on célèbre l’Armistice de la Grande Guerre. Aux Etats Unis, on célèbre tous les vétérans. Veteran’s Day aux US n’est pas férié, mais ne t’inquiète pas pour nous, on se rattrape sur Columbus Day et Martin Luther King Day. Aujourd’hui les enfants vont sortir de l’école plus tôt et rien que pour ça, j’ai une super envie de crier « Hourra », parce que qui dit « early dismissal », dit « pas de lunch box ».

Je ne suis pas en train de t’entretenir de la futilité de mon organisation alimentaire quotidienne du tout, je vais te parler de la journée d’hier, riche en émotions, que j’ai vécue.

Tout d’abord, j’ai déposé le musicos, sa trompette et son pupitre à 7:30 tapantes à l’entrée de l’école pour qu’il ait le temps de s’installer et de s’échauffer avec le reste de la Band. Tu sais, ce moment cocasse où les concertistes te donnent l’impression de faire n’importe quoi dans une cacophonie absolue l’air super sérieux. Là, comme je suis une mère parfaite, j’ai complètement oublié l’existence de ma fille qui lisait calmement et l’ai déposé à l’école avec dix minutes de retard. 

Le gymnase s’est rempli doucement de parents, vétérans et élèves de l’école pendant que la Band jouait de la pep music pour réveiller tout le monde. 
La principale a ensuite pris la parole pour inaugurer cette journée particulière. On a assisté au levé des couleurs, récitation des Pledges of Allegiance, et défilé des Scouts, je vais finir par faire une interro écrite en fin d’année, tu devrais savoir tout ça sur le bout des doigts depuis le temps.
La Band a alors joué l’hymne américain puis America the Beautiful, accompagnant les petites voix cristallines de la chorale de l’école des petits. 

C’est à ce moment-là qu’un pilote des Marines est arrivé derrière le micro. J’essaye de penser à une description pour que tu visualises le truc mais je vois pas. Si tu as vu Top Gun 18 fois comme moi, j’ai espoir de te faire partager ce moment délicieux. 
En fait, Tom Cruise, ses 24 ans et son blouson aviateur sont entrés dans la salle. Il a  pris la parole, puis a fait défiler sur grand écran des photos de lui aux commandes de son avion, avec son fusil en main en Afghanistan, avec des collègues à lui, avec des petits afghans qui lui tendaient la main et d’autres photos sur lesquelles il n’était pas et que j’ai déjà oubliées. 

Il a pris quelques questions dans l’assemblée: la directrice se chargeait de relayer les questions des enfants à la voix inaudible mais elle en a vite eu assez, alors elle a remercié Tom Cruise d’être venu et l’a poussé hors du pupitre alors que j’avais une question concernant sa situation maritale de pilote.

Elle a ensuite demandé à la Band de jouer les airs de musique de l’armée américaine, et comme j’adore la musique militaire, c’était un peu Noel avant l’heure. A chaque extrait interprété, les Vétérans concernés se levaient et l’émotion devenait palpable dans la salle.

C’est alors que mon fils trompettiste a été appelé au pupitre devant toute la salle pour interpréter « Taps », l’air joué à la trompette lors des funérailles des soldats américains. Si tu te demandes pourquoi mon fils, je te remercie de la question, et je te réponds que les solos sont attribués aux premières chaises de chaque instrument, tu entends là, comme j’explose de fierté?

L’audience n’en menait pas large et il y a eu des yeux embués à tous les coins de la salle. La commémoration s’est terminée, le gymnase s’est vidé et la directrice m’a fait un hug pour me dire combien elle avait apprécié l’interprétation de ma progéniture. 

Comme je ne perds pas le nord facilement, mon radar Top Gun m’a ramené auprès de ma copine qui avait invité Tom Cruise à participer. Elle m'a regardé et m’a dit « T’as vu Captain America? » d’un air entendu. Tu m’étonnes que je l’ai vu. Surtout que Tom Cruise, plus vrai mais plus vieux, l’Homme l’a rencontré cet été sur son lieu de travail et la seule chose qu’il m’a ramené c’est une photo trouble d’un mec en babygro noir de pilote au milieu d’un champ, où il est absolument impossible de discerner quoique ce soit.

Plus sérieusement, quoique je plaisante rarement quand il s'agit de Tom, aujourd'hui les écoles américaines feront une minute de silence à 11h11 pour se souvenir de tous ceux qui ont laissé leur vie sur une plage normande, dans un désert afghan ou sur une montagne yougoslave. 
Gardons, nous aussi, leur souvenir vivant en travaillant à la paix chaque jour.












mercredi 9 novembre 2016

Théorie dite "de la merde et du ventilo"





J’avais prévu de te faire partager le nouveau projet de l’école élémentaire de ma fille depuis plusieurs jours et puis, les événements étant ce qu’ils sont, j’ai décidé d’étoffer un peu mon article.

Demain, l’école de ma fille va célébrer Veterans Day en musique, grâce à un concert-hommage donné par la Band de l’école de mon fils. Il s’entraine avec passion et commence à appréhender un peu: il va jouer deux solos. Tu imagines ma fierté et mon angoisse, surtout qu’il va jouer Taps, l’air de trompette joué aux funérailles des soldats américains.
Ma fierté est encore plus grande parce que ma fille a participé au projet de l’école qui rend hommage à tous les vétérans ayant un lien familial avec les enfants de l’école. Ainsi, elle a conversé avec ses deux grands-pères qui ont tous les deux servis pour notre grande et belle nation afin qu’ils soient eux aussi présents sur ce mur, nommés,  accompagnés d’une photo suivie de leurs années de service. J’en ai profité pour ajouter un hommage à mon frère, engagé dans l’armée de Terre qui a perdu la vie en 1995 en ex-Yougoslavie, sous les couleurs de l’ONU.
Inutile de te dire, qu’aucun de ces trois protagonistes ne pensaient un jour se retrouver honorés de la sorte sur le mur d’une petite école américaine. Je suis ravie que cela arrive, surtout que leurs affiches ont été traitées avec le même respect que celui apporté aux vétérans américains. Quelqu’un ayant même pris soin de trouver le logo de l’arme à laquelle ils appartenaient en France, et ça, ça m’a fait plaisir.

Je suppose que l’émotion sera intense demain matin, surtout que la Band va jouer les hymnes de chaque arme et que chaque vétéran dans l’audience est invité à se lever pour que l’on puisse lui faire une ovation. Ce n’est évidemment pas une surprise qu’ici, on puisse cultiver le respect de ceux qui donnent leur vie pour leur pays.

Et puis, je ne peux évidemment pas passer sous silence l’élection du nouveau President des Etats-Unis. Je dois reconnaitre que, comme la plupart des expats français aux US avec lesquels j’ai un lien sur les réseaux sociaux, je suis toujours sous le choc.


Je tiens tout d’abord à te dire que la réaction de la communauté française des USA m’a d’abord réconfortée. Quand on est contrarié, on aime bien l'être à plusieurs et se réconforter, s’encourager ou le cas échéant râler et se plaindre. Et là me revient en tête une expression imagée apprise peu après notre arrivée ici: « When the shit hits the fan » (quand la merde frappe le ventilo), et ouais, l’idée, c’est qu’il y en aura pour tout le monde!
Ironie du sort, la copine qui me l’a apprise à fort probablement voter Trump, exutoire de sa haine pour la clique à Clinton, comme beaucoup d’américains.

C’est ce matin au réveil, que l’on a trouvé le message envoyé par un de nos copains texans, court, concis mais pas moins explicite:  « fuck ».
Je pense aussi à ce couple formidable de dames rencontrées à Austin qui m’avaient dit, six mois en arrière, s’être renseignées pour émigrer  au Canada. C’était la première fois que j’entendais ça!

C’est la grande majorité de mes voisins et concitoyens qui doit être heureuse. Surtout ceux qui s’amusaient à harmoniser leurs panneaux « Trump », « Say no to abortion", et « Hillary for prison » avec leurs pétunias, et les arrangeaient inlassablement tous les deux jours, en formation diamant, en quinconce et en rond depuis le mois d’Août. 

Je ne suis pas une experte en politique et je ne vais surtout pas me ridiculiser en te livrant une analyse politique de mon cru. Je crois que si tu as besoin d’en savoir plus, il y a assez de gars, là dehors, qui ne demandent qu’à être écoutés, quitte à dire un gros tas de conneries.

Je ne souhaite qu’une chose c’est que la haine qui sort de la bouche de ce monsieur ne donne pas une légitimité à tous les autres. Après tout, pourquoi s’encombrer de gêne et de bienséance ou de respect quand ton propre président n’en a aucun. Que le pire en l’homme me surgisse pas dans notre quotidien de façon naturelle sous prétexte qu’un chef d’état se permet des sorties indignes de son statut.
J’ai donc donné pour consigne aux enfants de ne pas parler des élections et de ne surtout pas se mêler des discussions qui risquaient d’en découler. 

On va assister maintenant au bal des faux culs et ça, ça va mériter de se délecter devant la télé de ce petit cidre breton que j’ai acheté en vendant un rein hier. Tous ceux qui ont bouffé du Trump après chacun de ses coups d’éclat en promettant de ne pas le soutenir, de ne pas voter pour lui, tous ayant des raisons légitimes de le faire tout en étant dans son camp, vont maintenant recourir à la séduction pour obtenir ses faveurs. 
George W. Bush, malgré tout ce qui nous sépare, je te le dis, ton vote blanc est une des rares choses qui m’ait fait jubiler ce matin, bon ça et aussi ce tweet qui disait:  
« Nous recherchons toute personne ayant eu un contact avec une bonne nouvelle en 2016, votre témoignage est important ».





lundi 31 octobre 2016

Halloween, El Dia de los Muertos, apprendre en s'amusant.






Ce week end, les enfants vont déambuler dans les rues, déguisés, pour fêter Halloween. 
Inutile de te décrire l’ampleur commerciale de la chose, tu te doutes qu’il y a de la courge, des déguisements et des décorations à gogo. Comme tous les ans, nous avons visité le « pumpkin patch » du coin. Il s'agit d'un champ dans lequel sont exposées des courges de toutes formes et toutes grosseurs. On trouve aussi dans le nôtre un labyrinthe-champ de maïs, un vendeur de pop-corn sucré-salé, de la viande grillée et du "cotton candy"(notre bonne vieille barbe à papa). Tous les parents du coin débarquent avec leur progéniture arborant les vêtements de circonstance, orange  automnal, et les font poser sur des bottes de foin, négligemment accoudés sur des courges géantes.

Pour la première fois nous y sommes allés en week end, mais on a fait la sortie avec nos amis texans qui, comme ils le disent eux-mêmes connaissant nos habitudes françaises plus tardives, « se couchent comme les poules » et donc ne trainent pas comme nous jusqu’à des heures indues: 19:30 en pleine semaine, dans un champ de courge qui sent le BBQ et le pop-corn à plein nez!
Les enfants ont traversé le labyrinthe sous les yeux du plus grand, blasé, qui nous a démontré l'année dernière, qu'"il suffit de tourner à main gauche tout le temps pour retrouver la sortie" puis ont choisi avec soin les courges qui allaient subir un « équarrissage » en règle pour devenir des « Jack’O Lantern ».
Comme tous les ans, nous irons faire le tour du quartier pour récolter une tonne de bonbons cancérigènes, merci les infos toujours très à propos, qui ne seront pas tous mangés, mais qui remplissent les yeux des enfants de joie et leur hémoglobine de triglycérides.
Au Texas, l’influence mexicaine est très forte et aucun mur ne pourra changer ça, alors on va aussi fêter « El Dia de los Muertos ». En effet, inutile de te préciser qu’il y a dans certaines communautés américaines une forte population mexicaine. Tu en as beaucoup entendu parler dernièrement à moins que tu ne vives en Corée du Nord.

Magnifique tradition religieuse qui se tient le week end de la Toussaint. Les maisons sont décorées et des autels à la mémoire des défunts sont dressés. 
La légende veut que les portes des Cieux s’ouvrent ce week-end et permettent à nos morts de nous visiter. On prépare donc des offrandes et notamment, des bonbons, el pan de muerto (une brioche aromatisée à l’anis), des jouets, des cigarettes et les sublimes sugar skulls, (crânes en sucre) appelés chez mes voisins du Sud, des "Calaveras". 


Rien de morbide ici, ce n’est pas un jour de tristesse, on se souvient et on célèbre nos morts. La Mort? On la tourne même en ridicule. Souvent représentée à l'origine comme un squelette avec un grand chapeau, elle est la "Calavera Garbancera". Elle est celle qui se la joue citadine avec son grand chapeau "à la Française". Plus tard, elle devient "la Catrina" surnommé ainsi par Diego Rivera,  le mari de Frida Kahlo. 

Un peu d'histoire, mécréants!


Si tu as lu Tintin "Le Temple du Soleil" et regardé Les Cités d'Or quand tu étais petit, tu es sauvé!
L’origine de cette célébration remonte aux civilisations d’Amérique Centrale telles que les Aztèques, Mayas etc… sauf qu’ils faisaient dans le genre glauque. Ils conservaient les crânes des morts pour leurs rituels. Ce petit crâneur d’Hamlet  n’a donc rien inventé. Et le Pan de Muerto n'était pas encore une brioche, mais selon la légende le coeur humain d'une princesse qui a voulu montrer sa dévotion au Dieu en le mettant à mitonner dans une casserole avec de l'amarante.
Quand les Conquistadors espagnols ont débarqué, ils ont un peu halluciné sur l'ambiance et ont donc décrété direct que ça suffisait les conneries païennes. Alors la fiesta avec les maccabées, hop, on va la déplacer à la Toussaint, notre Jour des Morts, El Dia de los Muertos, merci pour les deux du fond qui suivent, en même temps que le Samhain des Celtes. Si tu regardes toi aussi la série cochonne Outlander, (ceux qui ne connaissent pas, attendez la fin de l'article pour googleliser la chose) voient de quoi je cause. 
Pour les potes pervers qui ont déjà ouvert la fenêtre Google, sachez que le bouquin existe aussi, et qu'il y a plus d'une demi-douzaine de tomes. 
Pour les chouchous du premier rang, je vais vous coller quelques photos pour illustrer mon propos.
Pour toi, lecteur en général, je ne recule devant rien, j'ai donc vaillamment vérifié mes infos sur des sites en ESPAGNOL, et je dédie donc cet article à Don Ramon, sans vous, je n'en aurais pas été capable.
OLÉ!


La Catrina, à vendre!

Les oeuvres de ma progéniture: la courge gastroentérite 2015, la courge cannibale 2014, la courge prison et la courge "les yeux plus gros que le ventre" 2016.

El Pan de Muerto avant dégustation dans les mains de ma Calavera!


vendredi 28 octobre 2016

"You may all go to hell, and I will go to Texas" David Crockett


Un de mes premiers couchers de soleil texan: Spectaculaire!

En cherchant des photos pour illustrer mon dernier article, je suis tombée par hasard sur ces photos, nos premières photos du Texas. 
Elles illustrent bien les tâtonnements de notre arrivée, notre étonnement perpétuel, nos tentatives pour trouver nos marques et notre dépaysement total. 

Texas, nous voilà!

Ni véhicule ni chevaux autorisés.



Un de nos premiers achats, un barbecue. Il ne rentrait pas dans la voiture, on a du demander à nos voisins de le ramener dans leur pick-up. On nous avait refusé la location du véhicule de livraison, notre passeport et notre permis de conduire ne leur inspiraient pas confiance. 
Une route vers l'infini, et au-delà...
Depuis cette photo, j'ai pris une quantité incroyable de routes en photo, toujours droites et infinies. Un de mes grands plaisirs lorsqu'on part en road trip. Je ne sais pas trop ce que je vais faire de toutes ces photos mais je continue à en prendre.


Quand on a emmenagé, la maison était vide. On a loué des matelas non-fumeurs qui empestaient la clope et qui ont été livrés à 11h du soir. On a pas mal pesté ce soir-là, envisageant d'aller dormir dans un motel en bordure de Highway. Notre container n'arriverait que deux semaines plus tard. On a gardé de très bons souvenirs de ces deux semaines: on campait, on pique-niquait, on allait  à la bibliothèque de la ville pour envoyer des nouvelles à notre famille...


Un de nos premiers contacts avec la vie sauvage, rien de bien méchant, juste impressionnant!


Un de nos premiers contacts avec l’électroménager américain. Surnommé le Naspi, car il NASPIre pas, cet objet n’a eu qu’un seul dessein, me faire enrager tous les jours et me prendre pour Freddy Mercury. Basta.


Une cuve de pétrole qui a du style. Et aussi, prendre des photos en conduisant, c'est mal...


La patinoire opérationnelle toute l'année à Galleria dans Dallas: je dois dire qu’elle a fait son petit effet à notre arrivée en Août.


Deux mecs chapeautés en train de se faire cirer les pompes, une bière à la main, devant le White Elephant Saloon à l'entrée des Stockyards de Fort Worth.


Et finalement, notre premier Noel, les treize desserts, le blé de la Sainte Barbe, la Provence au Texas.



jeudi 13 octobre 2016

Le Guide du Texas partie 1




Quand je commence à parler du Texas, de sa beauté et de la variété de ses paysages, tu me connais, je n’arrive plus à m’arrêter. J’en fais des pages et des pages, et je digresse et j’essaye de te prouver par A+B que c’est beau. Quand on me demande si j'ai des conseils de visites, j'ai toujours peur d'en oublier. Je n'ai qu'une crainte, c'est le visiteur déçu. De toute façon si il est déçu, c'est juste qu'il n'a pas vu le Texas que je connais. Je suis un peu comme une maman fière de son rejeton devant l'assemblée des invités: "Allez, montre comme tu es beau et spirituel!"

Tu verras, le jour où certains guides de voyage vont se réveiller. Tu seras bien content de m’avoir écouté et d’avoir visité parce que ça va être la ruée et tous ces petits bijoux bien dissimulés vont être violés par les randonneurs du monde entier peu scrupuleux.
Même si je suis secrètement contente que le Texas ait eu les honneurs des couvertures de certains magazines français il y a quelques mois, je dois te dire que ça m'inquiète un peu. Adieu les plages et les routes désertes, les commerçants calmes et souriants, les aires d'autoroute rutilantes, les texans accueillants...

Laissons croire que les Texans ont la gâchette facile, le coeur de pierre, et le point de vue étriqué, sous peine de voir rappliquer des hordes de touristes sales et mal éduqués.

Et puis, n’oublie pas que, où que tu te tournes, au Texas, la diversité des paysages est à l’image du territoire: immense. 
Des plaines, des montagnes, des forêts, des bayous et du désert, le Texas, plus grand que la France, a de quoi te séduire et t'en mettre pleins les mirettes. 

Demande à un Texan d'où il est, il y a de fortes chances qu'il réponde "Born and raised in Texas, M'am". Il est fier, poli et comme tous les  Texans il aime son drapeau. Et comme tous les petits Texans, il connaît l'histoire de son état. Le State Board of Education, genre de comité de l'enseignement pour le Texas, a rendu obligatoire l'enseignement de l'Histoire du Texas pendant l'année de 7th Grade (5è de collège).
Ainsi les gamins du Texas connaissent les explorateurs qui se sont disputés leurs terres, les batailles qui ont gagné l'Indépendance et les Hommes qui ont compté. La bataille de l'Alamo n'est qu'un détail de ce qu'ils doivent apprendre. Ils jonglent avec la bataille de San Jacinto, celle de Gonzales et son intrépide "Come and take it", ils voient le sang qui a été versé pour leurs frontières, et les hommes qui étaient prêts à mourir pour ce qui n'était encore qu'une terre inhospitalière. Aujourd'hui, je te dévoile ce qui rend le Texan si fier et pour quoi il a fait le sacrifice de sa vie.


Le territoire texan étant immense, il te faudra douze heures pour rallier Beaumont à l'Est à El Paso, à l'Ouest. Nous en sommes les premiers contrariés, à chaque road trip, la question lancinante du "On est sorti du Texas?" revient régulièrement. Si tu as la chance de le traverser du Nord au Sud ou d'Ouest en Est, ton chemin va croiser la Hill Country, et ça, c'est ta récompense...

Texas Hill Country, suivez le guide!

Jacob's Well
 Jacob's Well, le puits de Jacob, une petite merveille de la nature au coeur de la Hill Country. Le puits est profond de 42 mètres, et court sur plus de 1,5km. L'eau y est à 20C toute l'année. Un grillage a été installé à quelques mètres de profondeur pour éviter les noyades. Plus d'un plongeur inexpérimenté a plongé et s'est perdu dans les tunnels du puits.
Quand nous y sommes allés, un groupe de gamins s'amusait à sauter dans l'eau jusqu'à ce qu'un shériff débarque. Telle une volée de moineaux, les nageurs ont disparu dans les buissons en quelques secondes!


Hamilton's Pool
Jusqu'à cette année, il suffisait d'arriver tôt devant le portail pour espérer entrer dans le saint des saints. Puis, deux années d'inondations à répétition ont conduit à une limitation des visites de Hamilton's Pool. Il faut dorénavant prendre rendez-vous pour visiter cette sublime caverne à ciel ouvert. Je te dirais bien qu'il y a eu des noyades récemment qui ont conduit à l'interdiction de la baignade mais j'ai peur de t'effaroucher. Et puis, pas besoin de moule-burnes pour admirer les lieux, bon sang!


Austin, sa skyline et son boardwalk sur le Lady Bird Lake
Austin, t'es trop belle. Tu m'as même rendu jalouse quand l'Homme y a fait une excursion sans moi, avec les copains français, au printemps. T'es belle, t'es cool, tes habitants sont jeunes, ouverts, progressistes. On m'avait dit du mal de toi avant notre première rencontre. On m'avait dit: "Tu verras, Austin, c'est une ville de crève-la-faim. Ils crèvent tellement la faim là-bas, que le gouvernement a du inventer une sécurité sociale juste pour eux." Ou bien:" Austin? T'y vas pour faire tes études. Alors tu trouves un petit boulot, et puis ton petit boulot devient ton boulot et tu finis jamais tes études."
Tu verras dans dix ans, Austin, tous ces cons qui ont la critique facile, tu leur en remontreras quand ils se battront pour venir vivre près de toi.

Mount Bonnell
Parce qu'Austin, elle est pas bête, elle vit au bord de l'eau pour se rafraichir au coeur de l'été texan. Des lacs à perte de vue, des rivières, des sources et le Mount Bonnell pour l'admirer, vu d'en haut.

Barton Springs à Austin
Et dans les sources, on s'y baigne. Une immense piscine à ciel ouvert, creusée dans la roche avec des petites écrevisses (protégées) au fond de l'eau fraîche (ça raffermit).


Zilker Park
Comment ça, si c'est le poumon d'Austin? Austin, c'est pas New York, les gars! On respire partout à Austin et pas que dans les parcs!

Parce que si t'as besoin de respirer, tu peux aller là:

Lady Bird Lake, Austin

 Là:



Ou là.


Et si tu m'écoutes, toi aussi, tu auras envie de dire I love you so much, Texas!


Mais oui, lecteur, je te love beaucoup toi aussi...


T'as noté le "partie 1" dans le titre?
Et oui, y'aura une partie 2. 
Bravo, t'es perspicace! Et impatient, j'en suis sûre...