lundi 23 janvier 2017

Le Texas: cuisine et gastronomie (partie 4)



J’te parle du chili? Le fameux chili et la question que tout le monde se pose.
Y a-t-il des haricots dans le chili?


Texas chili: to bean or not to bean?

Tu veux créer une émeute? Subir un torrent d’insultes et te retrouver  accessoirement étalé en tenue de plage sur internet?
Affirme que le chili compte des beans (haricots) dans ses ingrédients.
Le magazine Texas Monthly en a fait les frais récemment, après qu’un de ses journalistes a donné sa recette de chili comprenant des haricots. Les commentaires outrés des lecteurs ne se sont pas faits attendre:

  • « Tu manges dans ton assiette et je mange dans la mienne, OK? »

  • « Blasphème! Hérétique! Philistin! Tu veux cuisiner une soupe aux légumes et à la viande? OK, fais ce que tu veux mais n’appelle pas ça un chili! JAMAIS DE HARICOTS! Et puis quoi encore? Trump président? »

  • « Okay, alors on s’encanaille? Rajoute un bâton de cannelle ou deux! (La suite est difficilement traduisible, mais l’idée c’est qu’il envoie le gars se gifler la tête avec sa propre langue!) »

  • « Ravie d’apprendre que tu as apprécié ce… peu importe ce que c’était, mais on sait tous que ce n’était pas du chili . »

Le courrier des lecteurs atteint alors son apogée avec cette lettre, la dernière, la seule en faveur des haricots: 

  • « Cette idée de ne pas mettre de haricots a été lancée par une poignée de yahoos (ne me demande pas, je sais pas!) en bas, dans ce qui fait tout juste partie du Texas: Terlingua. »

(NDLR: Terlingua est bien située au Texas. Au Sud-Ouest plus précisément. Il s’agit d’une ville fantôme au coeur du Big Bend. Le mystère reste entier sur l’origine de cette secte de Terlingua qui ne mettrait pas de beans dans son chili!)


Ce matin, alors que j’achetais la poudre d’épices pour mon chili, je demande à la vendeuse dont le badge indique sur le revers de sa veste qu’elle est texane:  « Vous mettez quoi dans votre chili?
-De la poudre d’Ancho (délicieux parfum de piment fumé très soutenu), ail, oignon, viande, tomates pelées en dés. 
-Pas de beans?
Elle me coupe la parole et fermement répète « pas de beans »
-Et la viande, coupée au couteau ou hachée?
-Hachée. (ici, la viande hachée du chili est hachée plus gros que celle que l’on connait en France)

Les tergiversations et autres divergences ne se limitent pas à la présence des haricots dans le chili.
  • L'orthographe aussi est un challenge:"chili", "chile", "chilli"?
  • De même, la découpe de la viande est un sujet partagé: viande hachée ou coupée au couteau?
  • Tomates ou pas tomates?
Et les épices et leurs variantes…

Les bases:

  • Apparemment, le top pour la cuisson réside dans le matériel utilisé, ce que l’on appelle un « dutch oven » est recommandé. (Une cocotte en fonte)
  • Un chili bien assaisonné suit une règle simple: 2 livres de viande pour 4 cuillères à soupe d’épices et 4 cups de liquide.

Les piments:

C’est là que ça se corse. Il n’y en a pas un mais tout un assortiment et en plus ils changent de nom selon le mode de préparation! 
Tu crois que le Jalapeño, frais et vert que l’on met dans le guacamole est différent du Chipotle sec et jaune? 
Raté! C’est le même, juste une version séchée et fumée et largement plus piquante!
De même, l’Ancho est la version séchée du Poblano. L’Ancho donne sa saveur au Chili du Texas!

L’Histoire avec un grand H

Finalement à l’origine, à qui doit-on le chili?

Il semblerait que les Aztèques puissent en réclamer la paternité. Les conquistadors espagnols auraient en effet découvert les premiers ragoûts d’épices et langoustes sur des marchés il y a presque 5oo ans. Les piments ne sont pas utilisés à cette époque pour relever les plats mais aussi parce que leur présence permet de stopper le développement des bactéries!

Les Espagnols ont diversifié les viandes du ragoût épicé des Amérindiens en amenant avec eux du bétail au 16e siècle faisant donc évolué le plat. Il semblerait que le premier chili soit tout de même apparu dans une tambouille préparée par un pauvre « Tejanos » (nom donné aux Texans avant l’Indépendance) en 1827 à San Antonio. Le pauvre type qui n’avait rien pour se sustenter mélangeait autant de bas morceaux de boeuf que de piments à son plat pour espérer attendrir la viande et lui donner du goût.

Point sur lequel l’avis des habitants du Nouveau Mexique diverge: 
Ils affirment que les premiers piments ont été cultivés dans leur état au 16e siècle. 
Oui, mais le bétail prenait son essor au Texas à la même époque, répondent les Texans.

Je t’avouerai que je vais passer mon tour, j’ai déjà du mal avec ma ratatouille, je ne vais pas tenter de m’immiscer dans les querelles de clocher Tex-Mex!


La recette

En bref, j’ai trouvé une recette pour un mélange d’épices pour chili dans un de mes bouquins de cuisine. C’est la méthode emmerdement maximum, mais faut c’qui faut:
Il est recommandé de « toaster » 5 Ancho secs entiers, puis 1 cuillère à café de graines de cumin les réduire en poudre dans un moulin à épices (je suppose que le moulin à café dans la famille depuis un siècle exposé sur l’étagère du haut fera l’affaire), ajoute une cuillère à café d’origan mexicain (rien à voir avec le Méditerranéen) et 1/2 cuillère à café de poudre d’ail. Remets tout ça dans le moulin de Grand Mamie,  mouline! C’est prêt! 

Sinon, méthode alternative, la mienne: tu vas au supermarché du coin et tu achètes la « chili powder » de  la marque Gebhardt, du nom d’un jeune immigré allemand qui a fait fortune en vendant sa poudre dans les rues de San Antonio. 
Le jeune gars avait eu vent de la réussite de Kotanyi, un Hongrois qui vendait les épices pour le goulash sur les marchés autrichiens! 
Si tu parles couramment le hongrois, tu sais que « goulash » est dérivé de « gulyas » qui signifie « cowboy » et désigne donc la soupe mangée par les cowboys dans les plaines de Hongrie! C’est fou, non?
Une soupe contenant du boeuf et des épices, cuite dans une grosse marmite à même le feu, mangée par les hommes qui s’occupaient du troupeau. 
Tu veux aller plus loin dans cet incroyable parallèle?
Très souvent le mélange d’épices pour le chili contient du paprika: l’épice phare du goulash!



Pour en finir avec les haricots, j'ai récemment lu une explication possible de la présence des beans dans le chili. Elle pourrait se justifier par les restrictions dues à la 2e guerre mondiale, et non pas à cause de l'hypothétique présence de "yahoos" du côté de Terlingua!
La consommation de viande étant restreinte, les femmes, démerdardes comme toujours, ont donc du trouver une alternative nourrissante. La variante du chili avec les haricots serait donc entrée dans les moeurs, et y serait restée.

La prochaine fois, je te parle d'un de mes plats préférés dans les diners (prononce daïneurz) entre Texas et New Mexico... 



"He is nothing but a damn vegetarian.*" Sam Houston





*Il n'est rien qu'un foutu végétarien




mardi 17 janvier 2017

Le Texas: cuisine et gastronomie (partie 3)

Livres de cuisine texane: mes essentiels


Texas cuisine (à prononcer « couisine »)

Mais restreindre la cuisine du Texas a son seul BBQ, serait lui faire injure. 
On y mange le poisson chat comme le poulet, frit. On y a découvert l’okra, un petit légume vert et creux qui se mange coupé en tranches et frit. Le Texas a aussi son caviar, le "black eyed pea", un petit haricot blanc avec une tache noire comme un oeil en son centre, à déguster à Noêl. 
Et les tomatillos! Une sorte de petite tomate verte qui rentre dans la composition de la « salsa verde", une tuerie qui fait pleurer et te laisse la langue brûlée au 3è degré. Parlons aussi du « biscuit » (prononce biskite) tartiné avec du beurre en accompagnement du repas. Cette petite merveille a conquis nos palais, et c'est un régal quand elle est réalisée avec maestria!

Des " buttermilk biscuits" faits maison par un copain d'ici
Et les tacos? On en parle?
Je ne fais pas référence à ces horribles chaines qui ornent les bords de route, mais bel et bien aux petites merveilles fraiches que tu dégottes dans un food truck ou dans des micro restaurants, où tu hésites à rentrer parce qu’absolument personne ne parle anglais là-dedans!

Guac, tamales, tacos, la vie, quoi!

Et puis surtout la découverte de toutes ces saveurs que je n’utilisais pas dans ma cuisine auparavant ou avec parcimonie et séparément: la coriandre fraiche et le jus de citron vert mariés aux piments de toutes les couleurs, toutes les grosseurs et de toutes les formes! Le jalapeño, ancho, habanero, chipotle ou encore le Hatch du Nouveau Mexique qui fait tressaillir de plaisir tout le Texas dès la fin Août, à sa récolte. Il se mange grillé, sans sa peau et les Texans le mettent à toutes les sauces (c’est le cas de le dire), muffins, saucisses, pains ou tacos.

Et les sauces épicées qui accompagnent les tacos ou les viandes et qui marient les fruits, les épices et les aromates.
Par exemple, une de nos préférées, le pico de gallo. C'est une "salsa fresca".
Je taille en petits morceaux tous les ingrédients: l'oignon doux, des tomates mûres mais fermes, du jalapeño dont j'ai enlevé les graines. J'ajoute de la coriandre fraiche hachée au couteau et j'arrose de jus de citron vert. Certaines recettes ajoutent une gousse d'ail. Tu mets au frais et tu attends que toutes les saveurs se développent. on la dévore avec des chips de maïs! 

Et les tamales? 
Quelle découverte que les tamales! Une farce à base de poulet ou de porc déchiqueté cuite à la vapeur dans son emballage de feuilles de maïs, présentée sur un lit de haricots et de riz et arrosée d’une sauce pimentée.
Tu le sens le respect qui monte là? 
Le respect du Frenchy qui parle bouffe tout le temps, à tel point qu’il a créé des fraternités et associations en tout genre pour vénérer son péché mignon avec d’autres personnes atteintes du même mal: la recherche de la baguette parfaite ou la confrérie de l’escargot. Même sur internet, les expats en manque créent des sites pour se refiler le plan de la bonne bouteille en promo chez Traders Joe, le canelé de la mort à Philadelphie, le meilleur expresso de San Francisco, la seule galette des rois digne de ce nom du continent tout entier!

Comme un chef

J’te jure, on se refait pas, le Français aime manger, aime ce qui est bon mais certains croient encore avec certitude qu’en Amérique, on ne peut pas se sustenter. 
Je te l’affirme haut et fort:
Je n’ai pas vécu dans les autres états, mais au Texas, si tu veux bien manger, tu peux!
Ne te laisse pas influencer par ceux qui ont la langue acérée, l’esprit étroit, ceux qui vont te bercer de préjugés chauvins et de clichés faciles alors qu’ils ne connaissent du Texas que ce qu’ils en ont lu dans Wikipédia. 
Le Texas a beaucoup à offrir pour ceux qui sauront partir à sa découverte. 
J’ai récemment lu un passage dans un de mes bouquins de bouffe qui disait à peu près ça: le mot « Tex-Mex » a souvent une connotation négative (à cause notamment des boites jaunes maléfiques) mais rejeter ce type de cuisine sous ce prétexte, c’est comme dire que la cuisine italienne est dégueulasse sous prétexte que tu trouves aussi des spaghettis en boite!

Je peux même te citer des grands chefs qui ont su utiliser la cuisine texane et l’élever au rang d’oeuvre d’art. 

Stephen Pyles, « born and raised in Texas » (né et élevé au Texas), est leader de ce mouvement né il y a quelques années: the New Southwestern Cuisine (la nouvelle cuisine du Sud Ouest). Ses restos sont à Dallas.  Lorsque je pense au déjeuner pris chez lui, je visualise une salle magnifique, mariant modernité et tradition comme sa cuisine et j'entends encore tous nos soupirs de plaisir à l'arrivée de nos plats. De sa margarita au jalapeño et aux fruits de la passion jusqu'à son "butterscotch pudding" en passant par son "NOLA style shrimps and grits" tout a été parfait. 

Dean Fearing, autre chef de Dallas, a revisité un plat qui est emblématique de notre état bien-aimé et en a fait un petit bijou: la tortilla soup. Ça a l’air de rien dit comme ça et tu t’imagines peut-être un gazpacho mal dégrossi ou une souplette rougeâtre. Tu te fourres le doigt dans l’oeil jusqu’à l'omoplate, les saveurs de cette soupe me titillent encore le palais et je garde en mémoire une explosion de saveurs mêlant génialement piments, épices et aromates…

Bonnell's à Fort Worth: dans son resto, tu vas te régaler de viandes et produits qui proviennent des ranchs et exploitations du coin. Les Texas bruschettas sont "to die for" (à mourir). Les "Elk mini tacos" vont te faire découvrir ou redécouvrir le "grits" un plat typique du Sud des Etats-Unis que l'on pourrait comparer (de loin) à la polenta arrosée d'une sauce au " green chile" (piment vert) du Nouveau Mexique, de pico de gallo et de "queso fresco" (fromage frais mexicain). Chez lui, j'ai mangé du cactus grillé pour la première fois!

Fearing's



La prochaine fois, j'aborde le plat "polémique" et emblématique du Texas... 
"Stay tuned" comme ils disent ici!






samedi 14 janvier 2017

Le Texas: cuisine et gastronomie (partie 2)

Des vaches épanouies dans un champ de bluebonnet.

Texas BBQ

Le barbecue Texan prend de nombreuses formes et saveurs, mais une chose est sûre, la légende qui dit qu’au moins le resto de BBQ ressemble à un resto mais au plus il ressemble à un boui-boui est vraie. Tu vas manger avec les doigts, te sucer les doigts, peut-être même avoir de la sauce sur le menton, redemander des serviettes en papier à ton voisin de table, manger à même une assiette en carton ou autre corbeille en plastique, tu vas décréter que tu n’as plus de place pour tes « sides », coleslaw et beans (salade de choux et haricots), et tu vas te surprendre à dévorer tout ça en te félicitant d’avoir laissé tomber le végétarisme en entrant sur le territoire texan. 
A la fin de ton repas tu vas surement déclarer que tu arrêtes le BBQ texan quelques temps. Et puis, tu vas y revenir parce qu’ici le barbeuc c’est une institution au même titre que la religion et le football. 
On a pas mal écumé les « barbecue joints » (un resto de BBQ), on a testé, gouté, classé, noté, dans un peu tous les coins de l’Etat. 


Ribs, saucisses et beef brisket

BBQ de Llano

On a fait la queue plus d’une fois sur un parking enfumé, attendant d’entrer dans le saint des saints. C’est que le principe numéro un du BBQ, c’est d’avoir le temps et d’avoir le bois. La viande? Au Texas, on n’a pas vraiment de difficulté à en trouver.
La sauce est unique à chaque « joint », le pitmaster est le Chef et chaque région a sa propre saveur:

Dans l’Est du Texas, on ressent l’influence des états voisins, notamment Tennessee et Louisiane, (et question cuisine, on s’y connait par là-bas). Le porc sous forme de «ribs» trouve donc naturellement sa place dans le BBQ de l’Est. La sauce y est généralement épaisse et sucrée. 

Dans le Centre Texas, la sauce n’existe pas et est généralement remplacée par un «dry rub », un mélange d’épices savamment étalé sur la viande. Lockhart est un peu la capitale du « no sauce » et si tu vas manger chez Kreuz BBQ, une institution au Texas, il y a de fortes chances pour que tu ne trouves pas de fourchettes… Le Beef Brisket, un morceau de boeuf frotté au sel et poivre et cuit pendant une douzaine d’heures dans un fumoir au bois de chêne te tend les bras. Il est tendre et les arômes te donnent envie de te pâmer de plaisir.

Dans la Hill Country, à l’Ouest d’Austin, dans des bleds comme Llano (à prononcer Layno: on ne parle pas espagnol au Texas mais Spanglish) on jette le boeuf et des saucisses sur le feu. Et oui, des saucisses: on n’a pas oublié ses origines allemandes et tchèques et c’est bon! La viande est souvent cuite sur un feu à la différence d’autres régions où elle est fumée sur un foyer indirect. On y devine l’influence des « ranchers » et des « cowboys » qui cuisinaient sur des feux de camps. Nous avons visité la Hill Country à plusieurs reprises et nous avons remarqué la présence de chèvres, moutons, agneaux et autres bestioles du même acabit dans les champs. On les a donc logiquement retrouvés, dans un cadre moins bucolique, les pattes et le reste étalés sur les grills du coin.


Le BBQ joint de Llano


La prochaine fois, je te parle gastronomie et chefs... 

Prochain article: Texas cuisine (à prononcer couisine)

jeudi 12 janvier 2017

Le Texas: cuisine et gastronomie (partie 1)



A l’annonce de notre départ, je me souviens qu’un copain a demandé à l’Homme si j’allais écrire un blog de cuisine texane. A l’époque, j’avais trouvé l’idée saugrenue: « un blog spécialisé dans les hamburgers?! », et j’avais balayé l’idée sans jamais plus y penser. La semaine dernière lors d’une conversation avec ma copine J. la question de ce que j’allais faire de ce blog après mon retour s’est posée. Je suppose qu’en pessimiste avisée, j’ai du expliquer que ce blog allait mourir de sa belle mort à une vitesse à peu près équivalente à celle à laquelle j’allais sombrer dans la neurasthénie à mon retour dans la mère patrie.

Ma copine n’étant pas du genre à se laisser endormir par mes lamentations en tout genre, a répliqué que je n’avais jamais écrit sur la cuisine texane et que je pourrais créer un blog de bouffe vu que c’est une de mes passions « numéro un » dans la vie. 
Il faut avouer que ce n’est pas un hasard si la conversation a pris ce tour-là. Généralement nos bavardages commencent par un tour d’horizon concernant la santé de nos familles respectives, suivi par un « quick check» (un test rapide) météorologique de nos deux domiciles, suivi de nos complaintes politiques françaises, américaines puis internationales si on en a le temps. C’est qu’un point essentiel nous attend: « T’as cuisiné quoi à midi/ au goûter/ ce soir/ Dimanche?

Après un glorieux échange de recettes et d’avis divers et variés, on en vient à s’envoyer nos dernières photos gastronomiques en se congratulant mutuellement sur nos ambitieuses réalisations.

Après un quick check (bis) de mon blog, je constate qu’en effet, je ne t’ai jamais entretenu de mes découvertes gastronomiques texanes. 
Et je pèse mes mots, j’ai bien dit « gastronomiques ». 
Il y a une tradition culinaire texane qui remonte à bien plus longtemps que la découverte de ton premier « Big Mac » et que, oui, l’Histoire avec un grand H, extrêmement riche de cet état, a conduit à une vraie gastronomie, à la différence de certains autres états d’Amérique. 

Je dois reconnaitre que mes débuts ont été rendus un peu difficiles par la confrontation de mes papilles gustatives avec les piments omniprésents dans la cuisine texane. Je n’avais jamais mangé aussi épicé de ma vie. Le Texan mange épicé comme beaucoup des Américains du Sud, et il faut reconnaitre qu’il connait le sujet. 
Mais ne nous perdons pas dans les détails, j’y reviendrai plus tard. 


L’importance de la tradition et du brassage multiculturel

Ce qui rend la cuisine du Texas unique, c’est la succession de six pays souverains sur ses terres. 
Tout d’abord l’Espagne, la France, puis le Mexique, la République du Texas, les Etats Confédérés et pour finir les Etats Unis d’Amérique. 
Ces cultures se sont mélangées depuis plus de 500 ans, comme une bonne marinade pour créer un mélange explosif sur lequel ont été saupoudrées quelques pincées ou plus d’Allemands, Tchèques, Irlandais, Afro-Américains, sans oublier les « Native Americans ». 

Chaque ethnie apportant avec elle, le secret d’une cuisson, d’un ingrédient, d’un plat ou d’une saveur trouvant ses origines dans une contrée lointaine. 
Les immigrations successives ne sont pas les seules responsables de ce brassage: la diversité régionale est aussi un des piliers de la cuisine texane:
  • L’Ouest Texas et son chili,
  • La bande côtière et ses fritures de fruits de mer et ses crevettes au court-bouillon,
  • La tranche de boeuf du Panhandle,
  • Les ribs de porc de l’Est,
  • Les Kolaches de West, entre Waco et Fort Worth,
  • Les saucisses allemandes de Fredericksburg…
L'agriculture, l'élevage et les impératifs dictés par le relief et le climat étonnant pour ne pas dire éprouvant et agressif sont partie prenante de cette diversité.
Le Texan est aussi protecteur de son patrimoine culinaire que le Français du sien. J’imagine la tête d’un Texan devant une pub El Paso à la tv française. J’ai longtemps cru à cause de cette ridicule pub qu’El Paso était au Mexique. Le cliché de la famille mexicaine affublée de sombreros et de fausses moustaches, en train de manger des pseudo-tacos qui soit dit en passant s’effritent et te tombent sur les genoux comme des pauvres miettes: l’horreur totale. Et puis, El Paso est au Texas, bon sang!
Et ne me parle pas fajitas et tortillas qui baignent dans des sauces rouges infâmes et qui sortent de ces boites jaunes, je vais pleurer. 

Ça me rappelle l’histoire de la recette de la ratatouille de Jamie Oliver. Ne te méprends pas, j’adore Jamie Oliver! J’adore le personnage, son engagement et ses recettes, of course! Il y a deux ans de ça, il publie sur sa page Facebook, sa recette de ratatouille. Atterrée par la recette, présentée comme une fantastique recette de « comfort food » pour l’hiver, me vient l’idée dangereuse et saugrenue de commenter pour expliquer, à celui qui est derrière son clavier et qui n’est surement pas Jamie parce que je suis lucide, que sa recette est un ragoût de légumes mais surement pas une ratatouille. 
Il n’a pas fallu deux minutes pour qu’un torrent de haine provenant des groupies de Jamie se déverse sur moi: insultes, menaces, j’ai même constaté qu’une énervée avait fouillé les tréfonds de Google pour coller une photo de moi et expliquait que ma photo prouvait que j’étais évidemment une sale française arrogante. 
Je me suis alors souvenue qu’il n’y a qu’une réponse à opposer aux « haters » d’Internet: surtout NE JAMAIS REPONDRE. Le feu s’éteint généralement de lui-même. 


Sauf quand on se sent investie d’une mission divine. J’ai donc expliqué avec patience et pédagogie comment réaliser une ratatouille digne de ce nom. Au bout de quelques secondes, j’ai compris que leur offrir la recette de ma Mémé, c’était un peu comme donner du lard aux cochons. J’ai supprimé mon poste et j’ai trouvé du réconfort dans l’idée que ces incultes ne connaitraient jamais le goût merveilleux d’une vraie ratatouille de méridionale. 
Viens le ventre vide la prochaine fois, on rentre dans le vif du sujet...

Prochain article: Texas BBQ