mercredi 11 septembre 2013

Glen Canyon Dam et le Horseshoe Bend


Arrivés de nuit, sains et saufs, à Page, en Arizona, sur les bords du Lake Powell, nous n'avons découvert les lieux qu'au petit matin.

Un pur enchantement:
Des gens marchaient dans les rues, des enfants faisaient du vélo, des chiens aboyaient. Tellement différent du Texas!!! Nous n'étions pas étouffés par cette invraisemblable impression d'avoir emménagé dans une ville fantôme...
Cette ambiance chaleureuse nous ravissait au plus haut point et nous donnait envie de partir à la découverte de la ville. Nous nous sommes donc dirigés vers le Glen Canyon Dam, le barrage situé à la sortie de Page:






C'est le 4ème plus grand barrage des Etats-Unis, il approvisionne en eau les villes de Denver, Las Vegas, Los Angeles... Le Lake Powell est le 2ème plus grand lac artificiel d'Amérique du Nord. Juste pour le plaisir et puis parce que j'aime Norman Rockwell, (et surtout, parce que son interprétation se passe de commentaire...) voici le Glen Canyon Dam de N. Rockwell:



Bref, maintenant que j'ai bien plombé l'atmosphère, je ne vais pas en rajouter en t'expliquant que le fleuve Colorado n'est plus le fringant jeune fleuve qu'il était et, que même si ses crues subites font trembler tout le monde, qu'il traverse le Grand Canyon en star de cinéma et qu'il peut revendiquer la paternité des plus beaux paysages de l'Ouest, il ne ressemble plus qu'à une pissette, arrivé chez nos voisins du Mexique...

Non, non, je ne t'en parlerai pas, par contre, je vais te raconter notre "sortie" au Horseshoe Bend, le méandre du fer à cheval.

"Ne prenez pas vos chapeaux, avec ce vent ils vont s'envoler!" a crié l'Homme au moment où nous nous éloignions de la voiture, en tongs...
Tu sais qu'en te racontant cette histoire, je risque mon mariage? Remarque, il a survécu à Las Vegas, il devrait survivre à ça... (sois patient j't'ai dit...)
Alors sois attentif, je vais pas raconter 20 fois...

Pour organiser ce voyage, je me suis bien documentée, guides, cartes, avis et conseils glanés de ci de là... et puis pas mal inspirée de blogs de voyageurs avisés... Notamment un, dans lequel la visite du Horseshoe Bend, puisque c'est bien de lui qu'il s'agit, était décrite comme une petite promenade de santé vers un point de vue extraordinaire, 800m aller sur du quasi plat, faisable en tongs...
En effet, vue du parking, la petite montée est ridiculement courte et gérable, et l'on distingue quelques personnes, au sommet, fort probablement en train de prendre des photos à l'ombre sous l'abri...
Je n'en doute pas une seconde, car comme je l'ai déjà expliqué, les américains sont les rois de l'entertainment: tourisme? spectacle? Avec eux, pas de surprises, TOUT est toujours au point:
-tu as soif, tiens, une fontaine!
-un petit pipi? des toilettes!
-une photo souvenir? un rocher est installé face au point de vue pour poser l'appareil!

Et le summum: où que tu ailles, homme valide, sache que le moins valide te suivra...
Et là où tu mettras 3h à grimper, en bus, 2 minutes je mettrai.


Je ne doute donc pas une seconde que l'abri au sommet est LE point de vue...

Mais, arrivée en haut:


 Je n'allais quand même pas faire demi-tour, même si, au fur et à mesure que l'on avance, mes pieds glissent dans le sable, mes genoux craquent, le sable me fouette les cuisses, la sueur commence à ruisseler dans mon dos, et surtout, je croise des gens exténués, qui ont la mine anormalement violacée...

A l'arrivée, le point de vue est exceptionnel, à plus de 300m en contrebas coulent les eaux émeraudes du Colorado...
Aucun garde-fou pour empêcher les visiteurs de faire le grand saut... les enfants rampent sur les rochers avec nous pour s'approcher et contempler la vue...







On s'esbaudie un moment, mais la perspective de devoir repartir à la voiture nous fait un peu peur...
Nous commençons donc la remontée, c'est dur ... il fait chaud ... on doit atteindre allègrement les 40°C, les pieds glissent maintenant en arrière, le sable est bouillant, je suis liquide et mon mari, pour me motiver, déclare qu'il a clairement entendu un serpent à sonnettes dans les buissons...

Nous croisons alors, à mi-chemin de la falaise, un groupe de japonais, qui descend au pas de charge; les femmes sont couvertes de chaussettes de bras, de masques anti-UV Vadorien et coiffées de voiles opaques: et ils ne sont pas en tongs, eux...

Arrivée sous l'abri, je me jette sur le banc à l'ombre, que je dois partager avec un autre français, jeune, cuit, qui m'explique en haletant bruyamment qu'il n'aurait pas dû boire de bières à midi, et qu'il a l'impression qu'il va crever là...
Nous nous réconfortons mutuellement, et je commence à m'inquiéter sérieusement de mon avenir, ou plutôt de l'existence d'un avenir, quand je vois mon mari, (sûrement pris de remords, à cause du chapeau...) partir en courant dans la descente et remonter avec une bouteille d'eau et m'arroser nerveusement avec...

La dernière partie du trajet s'effectue sans encombres: je dévalle la pente les pieds ensablés, une tong à la main, mes tempes cognent aussi vite que mon coeur et je ne transpire même plus, j'ai plus d'quoi...

Un coup d'oeil dans le rétroviseur me renseigne sur mon compte:
Je suis pourpre.
Les japonais, eux, sont déjà de retour, l'appareil photo en bandoulière, en file indienne, en train de remonter dans le bus...

Il nous a fallu un petit moment pour retrouver nos esprits dans la fraîcheur de la climatisation de la voiture... Le temps de décider ce qui pourrait soutenir la comparaison après cette sortie. On n'a pas cherché longtemps:





Page, surnommée The Hub of the Grand Circle, le Centre du Grand Cercle, est située au centre d'un cercle imaginaire de 800kms de diamètre incluant Bryce, Zion, Le Grand Canyon, Arches, Canyonlands et encore bien d'autres merveilles naturelles...



samedi 7 septembre 2013

Wild Wild West

J'ai hésité longuement avant de te raconter mes fantastiques vacances, je ne voulais pas paraître désagréable et étaler le bonheur complet de ces incroyables 3 semaines sur les immenses routes de l'Ouest americain, alors que toi tu as zoné entre un Var surpeuplé et des Bouches du Rhône polluées, quand tu n'as pas eu a arpenter une Vallée du Rhône congestionnée...

Alors, oui, parlons de moi, tu vas voir, ca va te réchauffer, parce que je sais que tu as sorti ta petite laine ces derniers jours et que tu as commencé à regarder la couette (que tu avais rangée à la fin de l'hiver, le 15 juin...) d'un air de bravade...

Installe-toi dans ton fauteuil, avec ton plaid et ta tisane, je vais te faire rêver un peu...


Tout a commencé au mois de juin...

On a decidé de mettre la barre à l'Ouest, vers les grands espaces, vers les grands parcs, les longues routes au milieu du désert et les splendides paysages sauvages à perte de vue...
On partait de Dallas avec le Toy, le veau à 8 places, avec dans la ligne de mire, Las Vegas, pour le plus grand plaisir de tous (oui oui, c'est ironique, sois patient, on va y revenir)...




Nous étions prêts, ou nous croyions l'être jusqu'à ce qu'une amie américaine habituée de ce genre de périple, me demande à l'oreille d'un air entendu: "Vous avez une arme!"
Lui avouant que non, je notais en mon for intérieur, sur la liste des trucs à ne pas oublier, entre le dentifrice et le doliprane: "acheter une arme".
Je crois que c'est à ce moment-là que j'ai fait une croix définitive sur le camping sauvage, surtout quand elle a rajouté en montrant du doigt sur la carte: "Ici et ici, c'est pourri de serpents à sonnettes"...

Nous avons donc levé l'ancre au petit matin, en direction d'Albuquerque, au Nouveau Mexique; après 12 heures de route, nous avons débarqué dans un camping balayé par un vent brûlant, où le ciel était obscurci par la fumée des incendies, où le sable et la poussière se disputaient pour tourbillonner dans les allées, et où une piscine tiède recouverte d'une nappe d'huile nous tendait les bras...

Pour une première halte, c'était parfait: nous n'avons même pas déplié la tente et nous sommes partis à l'aube, pour ma part en me promettant de ne jamais remettre les pieds dans cet endroit, quoiqu'il nous ait offert la première rencontre sauvage de notre périple:



un roadrunner, ou géocoucou, Bip-Bip quoi!!!


A midi, nous sommes entrés dans Gallup, petite ville traversée par la Route 66, bordée de motels et de diners et dont l'intérêt principal est de centraliser la vente des bijoux indiens... et de voir passer tous les 10 minutes des convois de centaines de wagons sur la voie ferrée qui longent la rue principale...



Ca m'ennuie un peu de l'avouer mais on a un peu visité le Canyon de Chelly au pas de charge... je m'explique: j'avais organisé le programme des vacances et le coucher du soleil m'attendait pour le soir même au-dessus de... Monument Valley... et je l'attendais avec une grande impatience...
Et puis mes 3 premières photos sont quand même pas terribles, et tu vas finir par te lasser et aller te coucher avec les pieds froids.
Alors, bon, le Canyon de Chelly, tu prononces "di chay" pour montrer que oui, tu l'as vu et tu as lu le panneau:







 Dans mon esprit ne pourra JAMAIS rivaliser avec CA:





Le top du coucher de soleil, tellement grandiose, que tu te demandes si ce n'est pas un décor posé là derrière toi... ben, non, tu y es, c'est toi qui es rentré dans le décor, celui des vieux westerns que tu regardais le mardi soir avec Eddy sur fr3...

C'est tellement beau et tellement imposant et inattendu, que nous sommes restés jusqu'au dernier moment... jusqu'à ce que la pénombre nous déloge...

Je crois que c'est le moment opportun pour un intermède culturel malgré ton attention vacillante. Alors, du coup je vais tenter de la faire courte parce qu'il faut bien expliquer pourquoi l'Ouest américain est si riche de paysages hors du commun.
Il y a fort longtemps, genre super longtemps, avant Grey's Anatomy, tout cet immense plateau du Colorado:


qui représente environ 400 000 km2 et court sous 4 états (Utah, Colorado, Nouveau Mexique et Arizona) étaient submergés par les eaux. Au cours du temps, tu te doutes que ça s'est pas fait en 3 jours, le plateau s'est soulevé, et l'eau a modifié le relief en créant des fleuves, des lacs et en creusant des canyons...
Mon explication est simpliste mais d'un autre côté je ne crois pas que mon blog soit la ressource principale des géologues et j'ai un lectorat à tenir en haleine, moi...
Car mon histoire de Monument Valley pourrait s'arrêter là mais, je vais tenter un cliffhanger (si tu regardes des séries, comme moi, ce qui explique aussi que tu ne sois pas géologue, tu sais que le cliffhanger, c'est retenir le spectateur dans un suspense insoutenable jusqu'au prochain épisode...).

Regarder le coucher de soleil était très-très enthousiasmant, mais on commençait à avoir un peu faim, et moi quand j'ai faim je deviens rapidement chonchon...
On a donc attrapé la Bible des causes perdues, le Routard, et découvert que pour le coup, c'était sacrément mal engagé:
Pas un troquet ouvert après 9h à Kayenta, le patelin en question.
Tout était en effet fermé, sauf un horrible bouge dont je taierai le nom... sauf que c'est un film des années 80 et que Lambert et Adjani s'y promènent dans le métro... (oups! en aurais-je trop dit?)
Bref, nous avons poussé la porte et là, j'ai cru que la guerre bactériologique avait éclaté en notre absence...On a tenté de se substenter avec quelques chips, on avait quand même 2h de route pour rallier notre motel. Si tu nous connais bien, tu sais qu'un trajet de 2h nous en prend 4, parce qu'on aime bien regarder les lapins qui détalent sur les bords de route, prendre des photos de la flore et aussi j'ai une vessie grosse comme un sachet de thé et on a 2 enfants...
J'ai donc peu mangé et bien m'en a pris, car en plein désert d'Arizona, par un soir sans Lune, sans éclairage public, et pas de patelin à traverser... sur une route dont on ne devinait que ce qui se présentait dans la lumière des phares, c'est à dire pas grand chose, mon estomac faisait littéralement des noeuds.
Tu veux savoir si nous nous en sommes sortis? et où nous sommes arrivés?
Ca ne tient qu'à toi de le découvrir...